mardi 31 juillet 2007

C'est jour de Grève !

de Galopin74

Aujourd’hui, c’est jour de grève, on ne va pas à son travail, sa fac, son lycée. Mais on ne va pas non plus distribuer son argent au supermarché, à la station-service, au bar. On ne paie pas de factures ni ne dépose d’argent à la banque ce jour.
Les patrons, le gouvernement et ceux qui ne font pas grève pour leur faire plaisir n’auront pas notre argent aujourd’hui !
On laisse au garage sa voiture, on débranche son portable (ordinateur comme téléphone), sa télé, sa radio, on n’ouvre pas sa boîte aux lettres : leurs mauvaises nouvelles attendront un jour !
Pour un jour, on va respirer !
De toutes façons, les jaunes qui ne font pas grève dans les média sont ceux qui nous prennent en otage chaque jour avec des infos qui ne nous intéressent pas : l’insécurité, la menace terroriste, leurs guerres (économique ou contre un « axe du mal »), les tribulations de Sarkozy à la conquête de l’électorat du F-haine ou de Royal à la conquête de l’électorat de l’U.D.F…
Ce jour de grève, on va pouvoir aller à la rencontre de nos voisins, amis, famille, collègues, et même la grand-mère que l’on n’aura pas pu voir le lundi de Pentecôte que Raffarin a supprimé !
On ne va pas lire les journaux des marchands de canon Dassault-Lagardère (accessoirement marchands de traité Giscard) mais découvrir cette presse qui autorise à réfléchir et penser autrement notamment : le quotidien l’Humanité, l’hebdomadaire Le Canard Enchaîné, le mensuel le Monde Diplomatique et naturellement Le Galopin !
A la manif, on va reconquérir les rues, traverser la ville sans s’intoxiquer de gaz d’échappement, marcher à son rythme sans risquer de se faire klaxonner ou même écraser par un irascible, bref, se réapproprier la ville.
On va pouvoir rencontrer tout plein de gens différents avec qui discuter et découvrir qu’ils sont aussi humains que nous et bien plus que les journalistes qui ne cessent des les accuser de tous les maux : des jeunes qui veulent les moyens d’étudier pour pouvoir travailler honnêtement, des chômeurs non fainéants, des Sans-Papier qui demandent un asile et non des allocs, des femmes qui apportent beaucoup en sortant de leurs foyers, des fonctionnaires dynamiques qui se démènent pour rendre le meilleur service au public, des retraités qui se battent avec le seuil de pauvreté, des arabes admirablement intégrés, des communistes qui fourmillent d’idées neuves, bref des grévistes et syndicalistes qui ont massivement voté « Non » à la constitution Giscard (ou regrettent de ne pas l’avoir fait) mais qui sont bien plus porteurs des idéaux de progrès humain que devrait porter le 21ème siècle que ceux à qui ils disent « Non » !
On va pouvoir nouer des liens avec toutes ces personnes, se réunir, manger ensemble, faire la fête ensemble après le boulot, le bahut …
Ah ! Vivement la prochaine grève !

samedi 28 juillet 2007

Projet alternatif pour une constitution européenne


Un blog collectif relatif à la rédaction par les citoyens de projets alternatifs à la Constitution européenne 2007 a été ouvert, en association notamment avec le site Bellaciao. Il est destiné à diffuser l'information, à donner des clefs et à permettre aux citoyens de se regrouper autour de la rédaction d'un projet alternatif.
Par ailleurs, le 23 juillet dernier, la Conférence des Représentants des Gouvernements des Etats Membres a ouvert ses travaux destinés à rédiger un "nouveau" Traité Européen. A cette occasion le premier projet de "nouveau Traité" a été rendu public et il est désormais disponible en PDF ici .
Rendez-vous sur : Le blog

La fin du capitalisme saprophyte et la valeur dignité

Bernard Doray (1)

Parler du capitalisme, c’est d’abord parler argent. Et comme en général lorsque l’on parle argent, on parle coopération, alliance, construction, et aussi discorde, rapine, destruction du corps social : le viaduc de Millau et le cannibalisme des licenciements de convenance destinés à nourrir une société parallèle, celle des actionnaires. Aujourd’hui, cette ambivalence de l’argent du point de vue de la civilisation est plus que jamais la question.
Mais parler argent, ce n’est pas seulement parler de l’argent. C’est parler une langue comme on parle le tzotzil ou l’anglais. L’argent en lui-même ne « veut rien dire », mais il dit ce qu’on lui dit de dire. Il est la langue du monde marchand. Turgot, déjà l’avait remarqué. Marx fit de cet aspect langagier de l’argent une analyse plus conséquente. L’argent, la lettre du langage des marchandises, apparaît comme un ensemble de hiéroglyphes illisibles pour les hommes ordinaires. C’est que pour déchiffrer ces hiéroglyphes de la valeur des choses marchandes, il faut d’abord les dé-chiffrer. Au sens propre : oublier un instant les chiffres pour voir le rapport social que vient servir le principe de ce chiffrage de la valeur. Derrière la brillance du fétiche argent et le chiffre qu’il affiche, se découvre alors le revers de la médaille : les rapports sociaux pratiques, le vol de la plus-value, la vampirisation de l’œuvre sociale par l’Argent privé, l’argent détourné de sa vocation de mutualité et d’échange, pour faire plus d’argent au profit de quelques uns. L’illusion du juste salaire qui n’est que le faux-nez d’un système qui n’achète pas à l’homme la chose qu’il produit, mais l’usage de son corps productif. C’est autour de la grande arnaque de la plus value capitaliste que s’organise le Nouveau monde. Et c’est cela qu’il s’agissait de renverser pour remettre la société sur ses pieds, pour parvenir à une ère d’émancipation fondée sur un usage rationnel de l’œuvre sociale au profit du bien commun.
C’est en évoquant ce renversement de points de vue (le bien de tous en place du profit de quelques uns) que Marx formula la vision d’une économie post-capitaliste de la dignité « L’homme social, les producteurs associés règlent rationnellement leurs échanges avec la nature, ils la contrôlent ensemble au lieu d’être dominés par sa puissance aveugle et ils accomplissent ces échanges en dépensant le minimum de force et dans les conditions correspondant de la façon la plus digne [würdigsten] à leur nature d’êtres humains. » Ce radical Würd- (digne, dignité) apparaît ainsi à la fin du Capital, lorsque Marx se libérait du cadre contraint imposé par l’investigation de l’épisode historique du capitalisme dominé par la forme comptable de l’idée de valeur (Wert), et au moment où il pouvait envisager ce que pourrait être une économie véritable, rationnelle, dédiée au développement de la société réelle des humains réels… On connaît la suite.
La longévité de l’ère du capitalisme aura beaucoup tenu au paradoxe de son rapport avec la production. Depuis un temps séculaire, le capitalisme dit parfois « de production » a conjugué le profit de quelques uns avec le développement de toute la société. Cela était rendu possible par le fait que ce capitalisme-là puisait les ressources de l’accumulation des profits financiers privés dans le vif du travail des hommes et des femmes qui participaient à l’œuvre sociale (la production et le développement de la société). Cette incrustation du profit privé à la source du bien social a fait naître une étrange chimère : un capitalisme saprophyte – comme on appelle les parasites qui savent se fondre dans l’organisme de leur hôte, et parfois même s’y rendre un peu utiles. De fait, les classes moyennes et même une bonne part des classes les plus exploitées ont longtemps admis cet état des choses comme la condition d’un certain progrès de la civilisation : une rationalité nouvelle, les avancées scientifiques, la consommation de masse, l’éducation… Bref ceux qui voyaient là la marque d’une certaine vertu ne manquaient pas d’arguments pour affirmer que le capitalisme saprophyte, ça profite à tous.
Vinrent les années 1970. Pour des raisons que les économistes décrivent, le système, au sens propre, entre en délire (delirare : sortir du sillon). Il a campé là la charrue du labeur productif, de la construction de la société, et il laboure l’air et l’eau, qui deviennent des marchandises, les génomes, qu’il brevette ainsi que des produits de la pensée, des étoiles, et même le coup de boule d’un footballeur excédé ou encore la Vierge de Guadalupe. Pour la première fois dans notre pays, l’inauguration d’un très grand musée dédié aux cultures du monde est accompagné de l’annonce, par le Président de la république, du prix d’œuvres sans prix. Et puis apparaissent de grands chantiers de destruction sociale : des sources d’accumulation de l’argent plus directes, plus puissantes, telles que la spéculation à très grande échelle, des guerres sans buts de guerre réalistes, ou encore l’éclosion de circuits de trafics illégaux très puissants, très concentrés et polyvalents. De ce fait, l’argent privé, qui a pu apparaître longtemps comme un arbitre des élégances dans les rapports humains, le miroir des réussites les plus splendides, apparaît aujourd’hui à un grand nombre de citoyens du village planétaire comme un dangereux bateau ivre. Il leur apparaît donc raisonnable d’envisager le post-capitalisme.
Il ne paraît guère réaliste, cependant, d’envisager que la logique propre au profit privé pousse le système du capitalisme à revenir spontanément dans le sillon de la civilisation et du bien social. La question est alors posée aux citoyens du monde : quelles alternatives ? Quelles transitions vers cette alternative ? Le cœur, bien entendu, c’est l’économie. Mais sûrement pas l’économie confite qui fait de l’argent son objet électif. Il nous faut une rationalité économique qui inclue l’ensemble du développement social, ainsi que le domaine complexe de la subjectivité humaine. Ce serait une économie de la valeur – dignité. Et elle peut déjà puissamment se construire sur l’analyse de l’existant, puisque dans l’œuvre productive, à l’évidence, chacun le sait, on produit à la fois des objets marchands et de l’argent, mais aussi des développements de la subjectivité et de la dignité humaines.
Et puis, il y a des expériences plus spécifiques. Les Sociétés coopératives ouvrières de production (SCOOP), mais aussi le commerce équitable, les Services d’échanges locaux (SEL), les initiatives « gauche d’auteur » contre le brevetage marchand de la pensée, et bien d’autres initiatives commencent à marquer un territoire de résistance face au totalitarisme de l’argent privé. Mais peut-on rééduquer l’argent et lui faire tenir un autre discours que celui d’une poupée ventriloque qui rabâche le discours des possédants ? Peut-il devenir le vecteur d’un discours implicite de valeur-dignité ?
Dans les années 1970 - 80, les démocraties occidentales étaient encore abondamment dotées, d’asiles psychiatriques immobiles et poisseux. Le prix de journée y était l’unité de compte des activités. Plus un asile était plein, plus il était riche. Le prix de journée était implicitement une sorte de monnaie à l’effigie de l’asile ornée de la devise : « un citoyen malade dans son mental sera toujours un fou d’asile ». Localement, on décida de désaffecter le prix de journée et d’affecter les mêmes sommes journalières à la réinscription des vieux malades dans l’espace social des villes et villages. Voilà donc un argent qui changeait de discours : ayant gardé l’empreinte quantitative de l’ancienne forme, mortifère, des soins, il était devenu le garant de l’engagement public à faire le contraire avec des moyens aussi conséquents.
On terminera cette réflexion en évoquant, avec l’émotion que suscite parfois l’extrême intelligence de ceux qui créent face aux forces de néantisation, en évoquant la coopérative des apicultrices de la ville de S., en Algérie. Dans une zone plombée par l’intégrisme, elles sont une dizaine à avoir défié les railleries et les interdits implicites, et à avoir entraîné derrière elles un courant de sympathie et même d’admiration. Une clause de leur pacte résume tout. Chaque saison de récolte doit dégager une plus-value de partage : apprentissage gratuit de la compétence pour des sœurs (ou des frères) qui viendront apprendre le métier, et mise en réserve de ruches pour offrir des ruchers à ces nouveaux venus. Ainsi, ces ruches produisent-elles du miel, et donc un peu d’argent, mais on en attend aussi une inflation progressive de la dignité.
Alors, dans ce cas, parler argent, c’est parler le langage du désenclavement des destinées, de l’ouverture des possibles, bref, un langage nouveau de la civilisation.

(1) Psychiatre, auteur de L’inhumanitaire, ou le cannibalisme guerrier dans l’ère néolibérale (La dispute, 2000, et La dignité - les debouts de l’utopie (La dispute, 2006).

dimanche 22 juillet 2007

Invitation à la Folie

La Folie décida d'inviter ses amis pour un café chez elle.
Tous les invités y allèrent.
Après le café la Folie proposa : "On joue à cache-cache ?".
Cache-cache ? C'est quoi, ça ? demanda la Curiosité.
Cache-cache est un jeu. Je compte jusqu'à cent et vous vous cachez.
Quand j'ai fini de compter je cherche, et le premier que je trouve sera le prochain à compter.
Tous acceptèrent, sauf la Peur et la Paresse.
1, 2, 3,... la Folie commença à compter.
L'Empressement se cacha le premier, n'importe où.
La Timidité , timide comme toujours, se cacha dans une touffe d'arbre.
La Joie courut au milieu du jardin.
La Tristesse commença à pleurer, car elle ne trouvait pas d'endroit approprié pour se cacher.
L'Envie accompagna le Triomphe et se cacha près delui derrière un rocher.
La Folie continuait de compter tandis que ses amis se cachaient.
Le Désespoir était désespéré en voyant que la Folie était déjà à 99.
- CENT !
Cria la Folie , je vais commencer à chercher...
La première à être trouvée fut la Curiosité ,
car elle n'avait pu s'empêcher de sortir de sa cachette pour voir qui serait le premier découvert.
En regardant sur le côté, la Folie vit le Douteau-dessus d'une clôture ne sachant pas de quel côté il serait mieux caché.
Et ainsi de suite, elle découvrit la Joie , laTristesse , la Timidité...
Quand ils étaient tous réunis, la Curiosité demanda
- Où est l'Amour ?
Personne ne l'avait vu.
La Folie commença à le chercher. Elle chercha au-dessus d'une montagne, dans les rivières au pied des rochers.
Mais elle ne trouvait pas l'Amour.
Cherchant de tous côtés, la Folie vit un rosier, pris un bout de bois et commença à chercher parmi les branches, lorsque soudain elle entendit un cri.
C'était l'Amour, qui criait parce qu'une épine lui avait crevé un oeil. La Folie ne savait pas quoi faire.
Elle s'excusa, implora l'Amour pour avoir son pardon et alla jusqu'à lui promettre de le suivre pour toujours.
L'Amour accepta les excuses.
Et aujourd'hui, l'Amour est aveugle et la Folie l'accompagne toujours !

@ jolie histoire, que l'on doit à Nawel

jeudi 19 juillet 2007

L'espoir est une mémoire qui désire


On est bien peu de chose et mon ami la rose me l’a dit ce matin
A l’aurore, je suis née baptisée de rosée,
je me suis épanouie heureuse et amoureuse au rayon du soleil
Je me suis fermée la nuit, me suis réveillée viellie
Pourtant j’étais très belle, oui j’étais la plus belle des fleurs de ton jardin
On est bien peu de chose et mon ami la rose me la dit ce matin
Vois le dieu qui m’a faite me fait courber la tête
Et je sens que je tombe, et je sens que je tombe
Mon cœur est presque nu, j’ai le pied dans la tombe, déjà je ne suis plus
Tu m’admirais hier, et je serais poussière pour toujours demain
On est bien peu de chose et mon ami la rose est morte ce matin
La lune cette nuit a veillé mon amie
Moi en rêve j’ai vu éblouissant et nue son âme qui dansait
Bien au delà des nues et qui me souriait
Croit celui qui peut croire, moi j’ai besoin d’espoir sinon je ne suis rien
On est bien peu de chose, mon ami la rose me la dit ce matin
Tu m’admirais hier, je ne serais poussière pour toujours demain
"Mon ami la rose" chanté en 1964 par Françoise Hardy est de Cécile Caulier

mardi 17 juillet 2007

Aussi longtemps que ...


... nous ne pourrons vivre qu'en recherchant la bonne affaire, aussi longtemps que l'on dira "toi ou moi" et non "toi et moi", aussi longtemps qu'il s'agira non de progresser mais de devancer les autres, aussi longtemps il y aura des guerres.
Bertolt Brecht

lundi 16 juillet 2007

Une lettre


J’ai reçu une lettre
Il y a un mois peut être
Arrivée par erreur
Maladresse de facteur
Aspergée de parfum
Rouge à lèvre carmin
J’aurais dû cette lettre
Ne pas l'ouvrir peut être

Mais moi je suis un homme
Qui aime bien ce genre d'enjeu
Je veux bien qu'elle me nomme
Alphonse ou Fred c'est comme elle veut
Des jolies marguerites
Sur le haut de ses "i"
Des courbes manuscrites
Comme dans les abbayes
Quelques fautes d'orthographes
Une légère dyslexie
Et en guise de paraphe
La petite blonde sexy
Je n'aime pas les nones
Et j'en suis tombé amoureux

Elle écrit que dimanche
Elle s'ra sur la falaise
Où je l'ai prise par les hanches
Et que dans l'hypothèse
Où je n’aurais pas le tact
D’assumer mes ébats
Elle choisira l’impact
30 mètres plus bas

Je ne veux pas qu’elle s’assomme
Car j’en suis tombé amoureux
Grâce au cachet de la poste
D’une ville sur la manche
J’étais à l’avant poste
Au matin du dimanche
L’endroit était desert
Il faudra être patient
Des blondes suicidaires
Il n’y en a pas 100

Et moi je suis un homme
Qui aime bien ce genre d’enjeu
Je veux battre Newton
Car j’en suis tombé amoureux
Elle surplombait la Manche
Quand je l’ai reconnue
J’ai saisir par la manche
Ma petite ingénue
Qui ne l’était pas tant
Au regard du profil
Qu’un petit habitant
Lui faisait sous le nombril

Et moi je suis un homme
Qui aime bien ce genre d’enjeu
Je veux bien qu’il me nomme Papa … S’il le veut !

Renan Luce - La lettre (écoute !)

Le soleil noir de la mélancolie

Regard alentour
Choisie le terrain, il sied
Et gagne ton repos !

jeudi 12 juillet 2007

Et toujours tu seras mon bien aimé





Délaisse-toi de ce nom
qui n’est rien de ton être

et prends-moi toute entière ...

mardi 10 juillet 2007

L'art ne tient lieu de rien

Diane Scott, metteur en scène, et la question de la transmission. Publié sur La Gazelle Le journal du théâtre Dunois N°8. Mai- Juin 2007
Entretien réalisé par Céline Viel.

Qu‘est-ce que l’art peut encore transmettre aujourd’hui ?

Je ne crois pas que l’art ait à voir avec la transmission, sauf à être envisagé sous l’angle de la culture. La notion de transmission suppose un objet défini, on transmet “ des biens ”, “ un message ”, c’est-à-dire qu’elle induit aussi celle de possession. Je ne peux transmettre que ce que j’ai en propre. Or il est certain que penser l’art dans les termes finalement très bourgeois de l’acquisition et du patrimoine est une façon de manquer ce qui le caractérise vraiment. Peut-on dire que Kafka nous transmet quelque chose ? C’est un peu absurde. Sauf à dire de façon paradoxale que l’artiste ne transmet que ce qu’il n’a pas. Nous avons du mal à penser le rapport à nos objets hors des modes hégémoniques du “ capital ”, n’est-ce pas ?
Si l’art ne transmet rien, en revanche, on peut transmettre quelque chose de l’art. C’est toute la question de la démocratisation culturelle, si décriée aujourd’hui. Je suis frappée par l’omniprésence actuelle du discours sur l’échec de la culture comme politique publique. J’y vois l’alibi d’une critique libérale de l’Etat et une façon de déplacer les questions politiques sur le terrain de la culture. Les problèmes de la culture aujourd’hui, notamment l’injonction qui lui est faite de faire lien, se heurtent à des obstacles qui la dépassent, notamment à la dynamique économique, qui, elle, défait à tour de bras. L’économie aujourd’hui, c’est comme l’argent sale, on en blanchit les méfaits dans les domaines adjacents, et la culture est le Luxembourg de l’économie capitaliste ! La démocratisation culturelle ne connaît de crise que celle, symptomatique, qu’induisent les modes de production et d’organisation du travail contemporains et c’est une crise politique. Pourquoi n’exige-t-on que du Ministère de la Culture des objectifs de démocratie, et pas des autres ? J’ai peut-être l’air d’être hors sujet par rapport à votre question, mais je ne crois pas.
Car ce qui me paraît le plus au cœur de la question de la démocratisation culturelle, donc de la transmission, c’est moins une question d’objet que de rapport à l’objet. C’est moins la question quantitative de l’accès aux œuvres, de l’élargissement du public, comme on dit - qui est finalement une question d’efficacité publicitaire - , que celle, qualitative, du rapport que nous nous proposons aux représentations. Cela revient à parler des conditions de possibilité du rapport à l’art, et notamment de ce que les modes d’organisation actuels fabriquent comme rapport au monde, comme sujets. Dans quelle mesure la façon dont les modes de production nous constituent et organisent nos vies autorise un rapport à l’art, et lequel ?

Actuellement, n’assiste-t-on pas plutôt à l’injonction qui est faite à l’art d’être systématiquement subversif ?

Oui, au point d’oublier que l’art n’a pas toujours été sommé de faire du désordre. Il a d’abord été lié au sacré et au religieux, non ? Cette association entre art et transgression est au fond une attente très bourgeoise (j’entend par bourgeois non pas un groupe social mais une disposition d’esprit, un écueil dont nul n’est à l’abri). On pourrait reprendre en la transformant la fameuse phrase du philosophe Adorno : “ le bourgeois veut que la vie soit ordonnée et l’art subversif, le contraire vaudrait mieux”. Clamer que l’art est là pour transgresser, n’est-ce pas une façon de désamorcer toute subversion véritable d’une part, et d’autre part de cantonner au seul champ de l’art, bien inoffensif en l’espèce, toute remise en cause de l’ordre existant ? L’art ne tient de lieu de rien, on ne s’y dédouanera pas de ce qu’on ne fait pas ailleurs. Il y a une pratique du théâtre, dit politique d’ailleurs souvent, qui s’inscrit dans cette fausse agitation, comme la Fnac est elle-même “ agitateur ”… Il s’agit en général de prétendre dire le vrai, comme à une tribune, on explique qui sont les méchants. Mais si le théâtre, et l’art en général, peuvent être des événements, c’est bien parce qu’il y a là la possibilité d’un rapport au sens qui est autre que celui du savoir.

Est-ce que la représentation de Théâtre, éphémère par nature, ne force pas une relation particulière avec le spectateur qui le place d’emblée en marge d’un désir d’appropriation?

Je ne crois pas que le théâtre soit un lieu de résistance par nature. C’est ce que l’on dit en général pour défendre quelque chose comme une singularité, une “ noblesse ”, du spectacle vivant, que l’on y serait dans un rapport privilégié, d’immédiateté et de petit nombre. Mais je ne vois pas en quoi le fait que le théâtre “ touche ” moins de gens que le cinéma par exemple, théoriquement, et les touche soit-disant directement, serait le gage d’un espace préservé des problématiques générales. On investit le théâtre d’un fantasme démocratique, - comme du reste on investit le signifiant “ démocratie ” d’un fantasme de consensus - alors, confusément, on se flatte d’appartenir à un espace plus pur qu’un autre ! Mais il n’y a pas d’endroit statutairement pur. En revanche, le théâtre ne produit pas d’objets pérennes, cela implique que leurs auteurs, au sens large, metteurs en scène et autres, ne peuvent en attendre les dividendes d’objets que l’on transmet. Le théâtre est un art qui ne laisse pas d’objets. Et d’être confronté à l’évanescence de son propre travail, à quelque chose comme une perte finalement, est une chose qui, du moins pour moi aujourd’hui, ne va pas de soi.

mardi 3 juillet 2007

Nous sommes les sans-culottes et la racaille

La situation actuelle oblige à la créativité. Il est vain de désigner tel ou tel comme responsable, alors qu’il s’agit d’un problème de maîtrise collective de phénomènes qui animent l’ensemble de la société.

A la haine personnalisée ne faut-il pas – y compris pour le droit à la critique – préférer l’analyse et l'intelligence de propositions en regard des convulsions du monde capitaliste ? Car ces biens ces dimensions globale qui engendre les fluctuations les variables, les aléas au niveau électoral.

S’il y a quelque chose de nouveau à envisager comme critique constructive , c’est peut-être le fait que les orientations et les activités d’un parti de transformation révolutionnaire de la société ne peuvent dépendre des seules variables électoral. Certes ces variables sont des indicateurs incontournables dans le débat démocratique, pour apprécier le niveau de conscience, la solidité de l’engagement citoyen, ... . Mais chacun sait combien l’immédiat, l’événementiel, l’émotionnel, le spontanéisme humain l’emporte souvent sur une vision de longue durée.

Or le communisme peut-il se concevoir autrement que dans la durée, prenant en compte tout les éléments évolutifs de la société à l’échelle de la planète ? Exemple :

En passant de l’ancien concept correspondant à un moment de l’histoire : « Prolétaire de tous les pays unissez-vous ! » à une dimension d’un nouveau type : « peuples du monde entier unissons nos forces pour l’intérêt commun ! ».

A l’échelle européenne (et mondial, ou même nationale), ne voit-on pas – y compris dans les institutions actuelles – émerger fortement la nécessité de la notion d’intérêt commun », pour affronter les problèmes de l’immédiat et de l’avenir ?

De l’avenir de la planète et des dépenses utiles pour la recherche ; Les mesures contre le réchauffement de la planète, ; le traitement par la coopération des déséquilibre alimentaire et injustice de tout ordres ; l’utilisation de l’énergie (l’accès à -), des transports en commun ; l’exploitation de l’eau ; la course aux armements , ... ;

Ces éléments supposent de combattre le profit capitaliste et donc le système capitaliste lui-même avec son arsenal économique mais aussi juridique, social, intellectuel, culturel.

Objectivement, « intérêt commun » et « communisme » ne sont-ils pas indissociables à l’échelle d’une lutte contre l’égoïsme de classe au niveau mondial ?

Ce qui justifie un parti transformateur, pour exprimer les différentes formes de cette réalité et les propositions susceptible de modifier en permanence cet état de chose, par l’action quotidienne. Or ce ne sont ni les Verts, ni le parti socialiste ni les gauchiste de la LCR ou de LO qui peuvent en être totalement porteurs.

Et ce ne sont pas les aléas électoraux quelque soit leur importance qui doivent modifier une conduite durable d’un parti de transformateurs, s’appuyant sur des fondamentaux construit et enrichis constamment par les sciences, les techniques, la culture, l’économie, la philosophie, l’histoire des sociétés et de ses luttes quotidiennes. Un parti non pas scientiste, ou guide des consciences mais porteur de conscience laïque, de longue durée, nécessaire à l’action des individus pour transformer à la base la société. Donc « un parti pas comme les autres » est nécessaire. Là, peut-être une parenthèse s’impose quand à l’ancienne formule « un parti comme les autres : », formule adoptée dans un contexte particulier d’auto défense face à l’accusation de stalinisme.

Ainsi l’adhésion individuelle et volontaire pour une activité militante suppose une rencontre consciente et passionnelle pour dépasser les limites individuelles, enrichir le collectif et s’en enrichir.

Cette adhésion à un parti transformateur, en réaction aux conséquences diverses du système capitaliste ne peut être mise sur le même plan que toutes les autres formes d’activités. Elle a sa spécificité, même si elle s’inscrit non marginalement mais avec la « gauche » et les forces « sociales » pour une évolution général de la société.

« Communisme », « intérêt commun », « un parti pas comme les autres » , ne sont-ils pas des éléments indissociables dans une réflexion prospective d’un parti qui justement à sa raison d’être quoique l’on puisse en dire par ailleurs ?

En avant camarades !