jeudi 10 mai 2007

Nous n'avons pas peur

Nous pouvons tous lire la défaite de Ségolène Royal comme étant la mise en situation d’un parti socialiste - elle dit là où il en est aujourd’hui ! Son échec est celui d’une candidate incapable de défendre les points majeurs sur lesquels nous nous sommes battus depuis des années et particulièrement depuis le référendum. Si nous avons voté pour elle au deuxième tour c’est non pas parce qu’elle défendait nos idéaux (auquel cas nous l’aurions fait dès le premier tour !) mais parce qu’elle semblait être en mesure de nous protéger au moins temporairement des pires effets d’un régime libéral usant de moyens policiers et de toutes les ressources de la dictature pour arriver à ses fins.

Pour être court « il » nous fait peur et « elle » nous faisait moins peur !

Mais est-ce suffisant pour saluer son échec comme un échec de la gauche ?
En attendant, la campagne menée par Ségolène Royale, consistant à poursuivre La Droite au lieu de s’engager (à fond !) sur les idées et les ambitions qui constituent le patrimoine historique de La Gauche, et où, cette candidate là, s’est dite d’accord avec Sarkozy, non seulement sur l’ordre et la sécurité, mais sur nombre d’autres points, …, laisse perplexe pour le moins ! Je ne veux pas faire d’élitisme, et ce qui va suivre ne traduit pas mon sentiment profond, mais il me semble que le 6 mai 2007, c’est la victoire de la France des « Bronzés » (ce n’est pas un hasard que Clavier, l’ami de Sarkozy, a été à ses côtés tant qu’il a pu), la victoire de Mireille Mathieu, d’Enrico Macias et de Johnny Halliday. C’est la victoire du petit qui sue et qui s’habille comme un plouc, un parvenu, « too much », un « revanchard de la vie » dans lequel, paradoxalement, beaucoup de nos concitoyens ont pu se reconnaître. En face de cela nous avions Cali, Benabar, Emmanuelle Béart etc etc. Royal, ses brushings, ses tailleurs impec’ et ses airs de grande bourgeoise atteinte de bovarysme…
Je ne peux oublier cette image atterrante dimanche soir à la télévision : au balcon de la rue de Solferino, Ségolène Royal acclamée tenait un micro où l’on attendait une parole solennelle politique, pleine de gravité,... ; elle retourna souriante et muette le micro vers la foule qui l’ovationnait au cri de "merci Ségolène" pour enregistrer comme une berlusconnette illuminée les échos populaires de son "succès". Toute la campagne se résumait en ce geste désastreux de star incapable de prendre la mesure et le poids de son échec. Elle appelait ça "être à l’écoute"... !!!
De là à interpréter le taux de participation comme un record de l’audimat, il n’y a qu’un pas. Il est facile à franchir quand on prend la mesure de ce que fut le spectacle organisé depuis ces derniers mois. Non, ne regrettons rien excepté la violence à laquelle nous allons avoir à faire face, et le courage tout particulier que va nous demander le nouveau paysage "républicain" ! Voilà notre travail. Il est difficile parce qu’il s’agit de partager des analyses, de trouver les mots qui éclairent, de produire les gestes qui défendent, de prendre les risques qui peuvent mettre en péril ceux qui vont se battre pour plus de justice et plus de respect. Travail pédagogique, travail militant qui dépasse de très loin les taches électorales.
Il existe une puissance des faibles, cela s’appelle la parole, la reconnaissance mutuelle, en un mot la fraternité. C’est un engagement quotidien dans les gestes les plus simples jusqu’aux gestes parfois héroïques comme en donna l’exemple l’institutrice qui refusa la violence de l’exil et de l’exclusion d’un autre. Nous avons perdu une bataille mais, évidemment, nous n’avons pas perdu la guerre. Cette guerre, elle se joue depuis toujours, et se poursuivra sans doute longtemps (après nous), c’est la guerre contre le capitalisme.
Pour la mener, nous devons nous armer de patience, d’humilité, de rêves, et d’amour.

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